Lire le dernier livre de Joyce Carol Oates avec beaucoup d’émotion.
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NE PAS OUBLIER DE ….. Regarder les gens qu’on croise dans la rue.
Ante
En montagne, quand on croise quelqu’un, il est d’usage de se saluer. On s’en tient le plus souvent au « bonjour », sans ralentir son pas. Il fut pourtant une époque où ceux qui se croisaient sur un chemin de montagne, bien loin de tout, s’arrêtaient pour se parler. On se disait bonjour, tout d’abord, car rien n’est plus important que la politesse. Puis on se disait où on allait. Et puis aussi d’où on venait. S’il le fallait, on se donnait des informations sur un passage du chemin : à cet endroit, un peu plus haut, juste là après les rochers, ça glisse, attention… Puis chacun reprenait sa route en se disant au revoir.
Les montagnards sont des taiseux : on ne doit pas parler pour rien : cette façon de faire signalait combien la montagne est dure et rude, somme toute inhospitalière : il ne fait pas bon y être seul et c’est bien qu’on sache où vous allez, au cas où.
Etat des lieux
N’avez-vous pas déjà croisé quelqu’un dans la rue, mais à le frôler, sans même le regarder ? Ou dans un escalier ? Vous descendez. Quelqu’un monte. Qui était cette personne ?
Et au cinéma ? Quand on fait la queue, on regarde dans le vide ou on relit pour la énième fois les affiches. Oui, on s’intéresse beaucoup aux affiches mais savons-nous combien sommes-nous à peu près, là, en ce moment même, à attendre que le cinéma ouvre ses portes ?
Desnos, dans son dernier poème, parlait de n’être plus que l’ombre de son ombre. Croisons-nous quotidiennement des ombres ou des personnes ? Que choisissons-nous d’être ? des ombres …. des personnes…. Il me reste d’être l’ombre parmi les ombres / d’être cent fois plus ombre que l’ombre, écrivait Desnos
Ne pas oublier de
On pourrait ajouter sur la liste de ce qu’il ne faut pas oublier de faire : regarder les gens quand on les croise, simplement. Eviter de passer en ne regardant que ses chaussures, ou bien un horizon lointain, ou en ayant l’air préoccupé par une réflexion fondamentale sur l’imminence de la fin du monde. Accepter d’offrir son regard ouvert sur le monde. Certains ne le verront pas parce qu’ils n’imaginent pas qu’on puisse les regarder quand on les croise. D’autres seront réconfortés et se diront que la vie peut encore être douce dans ce monde incertain puisqu’un regard se sera posé sur eux.