S’autoriser à refuser une invitation.
S’autoriser à ne pas être à la mode.
S’autoriser à ne pas avoir un avis sur tout.
S’autoriser à dire non.
S’autoriser à ne pas se justifier.
S’autoriser à bailler d’ennui devant une émission littéraire.
S’autoriser à ne pas finir un livre qu’on trouve sans intérêt.
S’autoriser à être en retard.
S’autoriser à n’être sur aucun réseau social.
S’autoriser….
Et vous, aujourd’hui, qu’est-ce que vous allez vous autoriser ?
la question du lundi - Page 81
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La question du lundi : s'autoriser.
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La question du lundi : ne pas laisser les blessures avoir le monopole du souffle.
C’est tout à coup que quelqu’un se met à parler de soi-même lors d’une réunion entre collègues, mettant en mots ainsi la douleur qu’on a déjà perçue dans des gestes, dans une maigreur, dans un style vestimentaire, dans des essoufflements, dans des cernes, dans des rires ou dans les aigus d’une voix, dans des épaules qui tombent ou des mains qui tremblent. Ensuite, les échanges sont beaux et riches tout autour des tasses de thé ou de café pour apporter réconfort et témoignages à l’appui. Une question est posée :
- Et toi ? Comment fais-tu ?
On va chercher l’assiette de shortbreads qu’on pose sur la tablette repeinte en bleu vif et on dit que, si blessures il y a eu, si blessures il y a encore, si blessures il y aura certainement, on a toujours fait en sorte d’exister aussi avec elles et, dans les meilleurs des cas, en dehors d’elles car elles ne sauraient réduire notre être à la souffrance et à n’être que plaie. C’est ainsi que doit aller la vie. Il ne s’agit pas de les nier et de faire comme si elles n’existaient pas : bien au contraire, il faut leur laisser de la place ou plutôt, il faut leur laisser de l’air car une souffrance étouffée s’enkyste et s'enflamme. Mais pas toute la place car sinon les blessures ont le monopole du souffle. Comme on parle à un enfant à qui on explique qu’il doit partager, on peut parler à ses blessures en leur disant : « Ecoutez, vous, les blessures, vous n’êtes pas toutes seules ici. Poussez-vous un peu quand même pour qu’il y ait de la place pour le sourire, l’émerveillement devant une fleur, la lumière du ciel ou la simple communauté de la vie. Poussez-vous pour que je puisse respirer un peu. Vous êtes là, je le sais et je ne vous veux pas de mal. Vous êtes les blessures ; je sais bien ce que vous êtes ; je n’ignorerai jamais la cicatrice là sur la peau ou au cœur de mon cœur ou le tréfonds de mon ventre. Oui, vous êtes les blessures et vous êtes là dans ma vie. Je ne peux donc pas vous ignorer. Si je faisais comme si vous n’étiez pas là, vous seriez affolées et, dans votre douleur et dans un terrible sentiment d’abandon, vous ne pourriez que croître de plus belle, exigeant toute mon attention. Mon attention, vous l’avez, soyez-en certaines. Je vais prendre soin de vous, vous prendre à bras le corps pour vous apaiser. Quand vous aurez compris que je vous sais inoubliables, certes, mais que je ne vous laisserai pas me boucher la vue, nous irons d’amble, vous en repères sur mon chemin, moi debout regardant l’horizon. »
Qu’en pensez-vous ?