Lundi. C’est un ciel gris, tout uniformément gris. Et tellement près qu’on se souvient de quelques mots d’une chanson de Jacques Brel : « avec un ciel si bas qu’on pourrait le toucher ».
Mardi. De beaux gros cumulus blancs jouent à cache-cache avec le soleil. Alors, parfois on est dans l’ombre, et puis l’instant d’après, on ne l’est plus et il faut remettre sa main en visière. C’est rigolo.
Mercredi. Malgré le froid aigu, on ne reste pas dans le roof le temps de la traversée car on a toujours soif du ciel. Le mistral en balayant toute trace de nuage a rendu parfaite la netteté des teintes et quasi primaires les couleurs de sa palette : blanc et vert pour les collines, bleu pour la mer et pour le ciel.
Jeudi. A l’est, là où on repère le prochain lever du soleil car le ciel se rosit, de grandes cheminées de nuages violets s’élèvent au plus haut : est-ce le train de la nuit qui s’enfuit au plus vite ?
Vendredi. C’est la nuit encore. Tout est bleu de Prusse, sauf la lune, bien sûr, brillamment croissantée. Une étoile, tout près d’elle, comme une mouche sur le visage d’une belle princesse, fait un décor parfait pour un dessin d’enfant.
Samedi. Ciel en aquarelle en ce début de matin puisque de larges bandes roses et bleues sont tracées çà et là comme aurait pu le faire un peintre amateur qui ne sait pas encore dessiner les nuages. Le soleil est dans une brume très claire et mousseuse. On se doute que, quand il sera levé, il sera éblouissant, en concurrence, c’est certain, avec les mimosas.
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Les pages du ciel.
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Passer d’un ciel à l’autre.
Passer d’un ciel à l’autre : du ciel de l’instant présent, celui qui nous enchante depuis plusieurs décennies maintenant ; à celui-là qui inspire tous les autres.
On le reconnaît d’emblée car il est unique par la forme de ses nuages au-dessus des montagnes et par les teintes anthracites qui signalent l’avancée du jour.
Ici aussi, mer et ciel se mêlent : c’est un même monde.
On sait comment cela sera : le matin gris ; l’émergence de nappes ensoleillées ; le bourgeonnement des nuages aussi joufflus que les vagues en rouleaux ; l’étirement du ciel qui se fatigue puisque le jour s’avance et que bientôt il fera nuit noire, non, nuit Bleu de Prusse.
Et on notera dans le petit carnet des pages et des pages de ciel, sans oublier l’horizon. Ici, on a toujours aimé regarder le lointain.