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prendre le temps de lire

  • Asse, prendre le temps de lire, prendre le temps de méditer, prendre le temps de relire, coupe-papier en ébène.


    Passer une bonne partie de l’après-midi à lire Un été avec Geneviève Asse de Sylvia Baron Supervielle. Une lecture lente, qui se déguste. D’abord parce qu’il faut découper les pages du livre (mais depuis combien d’années n’avait-on pas fait cela ?). Ensuite parce que les propos de Geneviève Asse incitent à la méditation comme le fait son œuvre. Quelques mots comme « la lumière naît de la transparence », par exemple. Enfin parce qu’elle cite des peintres qu’elle aime ou des œuvres qu’elle aime ; alors on interrompt la lecture un moment pour feuilleter un livre sur Braque, un autre sur Seurat. Et puis on va regarder les reproductions de ses carnets devant lesquels on reste un bon moment. Et puis on l’imagine dans son jardin : « le carnet m’accompagne dans le jardin, alors que j’ai posé quelque part un porte-plume et l’encrier d’encre de Chine. » Et puis après avoir préparé une tasse de thé en gardant le livre coincé sous le bras, comme la lumière du jour baisse puisque c’est novembre, on s’installe près de la fenêtre pour relire, le coupe-papier en ébène servant de marque-page pour les autres moments de rêve. Quand enfin on pose le livre, on sait qu’on y reviendra et que toujours on s’en souviendra.

  • Un printemps avec George Eliot : Middlemarch : prendre le temps de lire ce qui fut long à écrire.

    Par moments, l’urgence est là et un seul livre s’impose comme étant du matin, du sac à main et du soir, et de tous les instants où on peut grappiller un moment de lecture : Middlemarch, de George Eliot. 1150 pages en édition Folio. C’est ainsi qu’à un moment où on sort le livre de son sac on sent les regards alentour converger vers ce « pavé ». Les questions fusent – sachez que ce sont des questions pour lesquelles celui ou celle qui les pose n’attend pas de réponse, et on n’a pas répondu : « Mais c’est encore un nouveau livre ? », ou encore : « Mais qu’est-ce que vous lisez ! et celui-là, c’est pas de la tarte, visiblement… » (et de prendre le volume dans la main pour le soupeser) ; on entend aussi : « Mais vous vous y retrouvez, dans tous les personnages ? », « Mais c’est pas trop compliqué, cette histoire ? », « Mais ça ne vous fait pas mal aux yeux, car c’est quand même écrit petit ? », « Mais… mais…. Vous écrivez sur les pages ? Au stylo ? », « Et c’est qui, George Eliot ? » … Puis la remarque fatale en rendant le volume : « Faut du temps, pour lire ça. »
    Ah oui, le temps… En y réfléchissant bien, c’est de cela dont on aimerait parler : le temps de la lecture. Lire un roman pareil, c’est long. Même si on est passionné par l’histoire, même si on ne rate aucune occasion de lire, même si on y consacre le plus de temps possible dans une journée ordinaire et qu’on ne regarde pas la télévision, c’est long. Pas question, pendant la lecture de Middlemarch, 1150 pages avec préface, chronologie et notes, de céder aux sirènes des nouveautés littéraires dont la plupart, il faut le reconnaître, n’atteint pas les 500 pages. Si on veut arriver au bout, il est préférable de ne pas s’éparpiller, au risque de faire baisser la moyenne de livres lus par mois (il y en a qui note ça…)
    On pense aussi à l’auteur qui a écrit tout ça à la main. On est allé voir quelques pages manuscrites sur le site de la British Library… On imagine un premier jet, une première version, une deuxième peut-être, une version définitive… Le bruit de la plume sur le papier… Un énorme travail pour que nous, lecteurs, nous ayons des heures de lecture passionnée. Des heures de création, des heures d’écriture, un projet pensé de la première à la dernière page : la notice en fin de volume donne à ce sujet des informations très intéressantes. Et une culture… Quelle femme, cette George Eliot, au courant de tout ce qui se passait de son temps, ayant lu elle-même quantités d’ouvrages, ayant des idées et sachant les exprimer, ayant des opinions et faisant tout pour convaincre.
    Mais poursuivons la lecture…