Il est temps de récolter les belles-de-nuit. Elles proposent toutes, en ce moment, de ces graines noires qu’il est facile d’attraper ; parfois, les graines sont grosses et rondes ; dans d’autres massifs, elles sont plus allongées, légèrement pointues. Dans le nouveau quartier qu’on explore depuis bientôt deux ans, on a déjà repéré les bons coins. Juste à gauche du portail blanc, le long de la barrière du voisin, ce sont les grosses rondes. Un peu plus loin, vers la boulangerie, ce sont les pointues. Mais il y en a partout, surtout des jaunes, d’ailleurs. Pas de rouges ici, ni de blanches. Du moins, on n’en a pas encore vu.
Quand on en croise sans avoir prévu d’en cueillir, on les met dans la poche. Quand on part pour la cueillette, on sort du sac à dos un pot de confiture vide.
On en a déjà un plein, posé sur le billot blanc. Il est tout près du petit flacon en verre où restent les graines de celui qui les plantait partout dans son jardin car il aimait, les nuits d’été, y aller respirer leur doux parfum et à chaque fin de saison, il les récoltait aussi et en donnait à qui en voulait. C’est tout ce qui reste. On les plantera aussi dans ce nouvel espace qu’il ne connaîtra jamais et on les mélangera avec les nouvelles. Quand elles auront poussé, rien ne les distinguera les unes des autres. Ce sera bien ainsi.
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Belles-de-nuit éternelles.
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Rite : récupérer ses graines de belles-de-nuit.
Comme chaque automne, récupérer les graines de belles-de-nuit.
Choisir les plus grosses, celles qui brillent presque, et quand elles roulent et tombent à terre, se baisser pour les ramasser parmi les feuilles.
Cela fait plus de vingt ans qu’on fait cela, dans ce jardin-là. Avec les années, les fleurs sont passées du jaune au fuschia.
De quelle couleur seront-elles là où on les plantera bientôt ? On en mettra près d’une balustre, en hommage, car celui qui avait donné les graines avait fait cela dans son propre jardin : il trouvait que belles-de-nuit et balustres, ensemble, l’été, c’était beau.