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relire d'anciens bonheurs du jour - Page 3

  • Ranger, troc, relire d’anciens Bonheurs du Jour, mérévilles, terre.


    Quotidien : Ranger le tiroir dans lequel sont les couverts. Maison bien rangée, cerveau apaisé.

    Troc : Gelée de coings contre le catsitting d’une jolie minette tricolore.

    Relire d’anciens Bonheurs du Jour : « Les mérévilles (1) sont arrivées à la maison. Posées tranquillement sur le plan de travail de la cuisine. Dessous, plusieurs poches en papier bien étalées car elles sont pleines de la terre dans laquelle elles ont poussé. Leur terre. Quand on les a prises dans les mains avant de les mettre dans le panier, on en a eu les mains pleines aussi, sans pour autant avoir l'impression de les salir. Plutôt de participer à ce cycle de la vie, quand on plante une graine, qu'un fruit pousse, qu'on le cueille parce qu'il peut alors nourrir. On va laisser les mérévilles pleines de terre jusqu'au moment où on préparera la confiture. Nul besoin de les laver pour en faire des fruits présentables parce que propres. Les laisser comme ça, c'est aussi une façon de maintenir ce lien si nécessaire avec la terre. Terre, terreau, terrien, terrienne, terroir. » (27 octobre 2019)


    (1) Les mérévilles sont des pastèques à confiture.

  • Durant l’été, relire d’anciens Bonheurs du Jour : ne pas laisser les blessures avoir le monopole du souffle.


    26 mars 2018. Ne pas laisser les blessures avoir le monopole du souffle.

    C’est tout à coup que quelqu’un se met à parler de soi-même lors d’une réunion entre collègues, mettant en mots ainsi la douleur qu’on a déjà perçue dans des gestes, dans une maigreur, dans un style vestimentaire, dans des essoufflements, dans des cernes, dans des rires ou dans les aigus d’une voix, dans des épaules qui tombent ou des mains qui tremblent. Ensuite, les échanges sont beaux et riches tout autour des tasses de thé ou de café pour apporter réconfort et témoignages à l’appui. Une question est posée :
    - Et toi ? Comment fais-tu ?

    On va chercher l’assiette de shortbreads qu’on pose sur la tablette repeinte en bleu vif et on dit que, si blessures il y a eu, si blessures il y a encore, si blessures il y aura certainement, on a toujours fait en sorte d’exister aussi avec elles et, dans les meilleurs des cas, en dehors d’elles car elles ne sauraient réduire notre être à la souffrance et à n’être que plaie. C’est ainsi que doit aller la vie. Il ne s’agit pas de les nier et de faire comme si elles n’existaient pas : bien au contraire, il faut leur laisser de la place ou plutôt, il faut leur laisser de l’air car une souffrance étouffée s’enkyste et s'enflamme. Mais pas toute la place car sinon les blessures ont le monopole du souffle. Comme on parle à un enfant à qui on explique qu’il doit partager, on peut parler à ses blessures en leur disant :

    « Ecoutez, vous, les blessures, vous n’êtes pas toutes seules ici. Poussez-vous un peu quand même pour qu’il y ait de la place pour le sourire, l’émerveillement devant une fleur, la lumière du ciel ou la simple communauté de la vie. Poussez-vous pour que je puisse respirer un peu. Vous êtes là, je le sais et je ne vous veux pas de mal. Vous êtes les blessures ; je sais bien ce que vous êtes ; je n’ignorerai jamais la cicatrice là sur la peau ou au cœur de mon cœur ou le tréfonds de mon ventre. Oui, vous êtes les blessures et vous êtes là dans ma vie. Je ne peux donc pas vous ignorer. Si je faisais comme si vous n’étiez pas là, vous seriez affolées et, dans votre douleur et dans un terrible sentiment d’abandon, vous ne pourriez que croître de plus belle, exigeant toute mon attention. Mon attention, vous l’avez, soyez-en certaines. Je vais prendre soin de vous, vous prendre à bras le corps pour vous apaiser. Quand vous aurez compris que je vous sais inoubliables, certes, mais que je ne vous laisserai pas me boucher la vue, nous irons d’amble, vous en repères sur mon chemin, moi debout regardant l’horizon. »