« Depuis leur première apparition, j’épie les boutons de rose minuscules et serrés, comme des écrins en miniature, tantôt ronds, tantôt allongés, avec parfois des pétales disposés capricieusement, par petites giclées. Chacun d’eux m’inspire une tendresse poignante, mêlée de curiosité envers les nuances, les formes comprimées jusqu’à l’invraisemblable. Et puis enfin, quelque chose transparaît : l’étreinte des sépales se relâche, tandis que la fleur pousse afin de s’ouvrir à la rencontre de la lumière. Pour le bouton, c’est la capitulation, et alors les rôles s’inversent : on voit la petite couronne de sépales ployée, vaincue, au pied de la fleur triomphante, tantôt dessinée selon des lignes Art nouveau, tantôt fluide comme dans la tache de couleur d’un impressionniste, tantôt avec des pétales disposés en corolle simple, comme dans un codex enluminé. » (p. 84)
Magnifique et émouvant livre de Pia Pera, Ce que je n’ai pas encore dit à mon jardin, Ed. Arthaud, traduit de l’italien par Béatrice Vierne.
on n'a jamais assez de roses
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Gourmandise de mots : les roses de Pia Pera.
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Au milieu des roses.
Etre au milieu des roses, avec un fleuriste qui en parle comme si elles étaient des êtres vivants.
Alors celle-ci, dit-il, elle est grande et très parfumée ; il la tient par la tige, et la regarde au bout de son bras tendu. J’en ai reçu plein ce matin, elles viennent toutes de La Crau. Ah, elles sont si belles…. Ce blanc immaculé…
Et elle, poursuit-il, elle est plus petite, mais sa corolle, une fois ouverte, c’est une splendeur. Il la tient des deux mains, comme on peut tenir un bébé sur les fonts baptismaux, la fleur rouge délicatement posée dans sa paume.
Ah, et vous avez celle-là, aussi, sa teinte est très douce. On dirait des joues, hein ?
Alors, on prend les blanches, surtout des blanches, et un peu de rouges, et quelques rose pâle, et aussi quelques rose thé ; et aussi des rose soutenu, presque fuchsia.