Dans les rayons de la médiathèque, j’ai feuilleté ce recueil de poésie de Fernando Pessoa et j’ai lu ce magnifique poème qui m’a touchée en plein cœur. J’avais oublié mon petit carnet et je ne pouvais pas le recopier. Alors, j’ai emprunté le livre pour le faire à la maison.
"Je suis sorti du train,
J’ai dit au revoir à mon compagnon de voyage,
Nous avions été ensemble dix-huit heures durant.
La conversation agréable,
La fraternité du voyage,
Ça m’a fait de la peine de sortir du train, de le quitter.
Ami occasionnel dont je n’ai jamais su le nom.
Mes yeux, je les ai sentis, se sont imprégnés de larmes…
Toute séparation est une mort…
Oui, toute séparation est une mort.
Nous, dans le train que nous nommons la vie,
Nous sommes tous occasionnels les uns les autres,
Et nous avons tous de la peine quand finalement nous débarquons.
Tout ce qui est humain m’émeut, parce que je suis un homme.
Tout m’émeut, parce que j’ai,
Non une ressemblance avec des idées ou des doctrines,
Mais la vaste fraternité avec l’humanité véritable.
L’employée de maison qui a quitté dans la tristesse,
Toute éplorée de saudades,
La maison où on ne la traitait pas très bien…
Tout cela est dans mon cœur la mort et le malheur du monde.
Tout cela vit, parce que cela meurt, au fond de mon cœur.
Et mon cœur est un peu plus grand que l’univers tout entier."
Fernando Pessoa, Poèmes d’Alvaro de Campos, Ed. Christian Bourgois, traduit du portugais par Patrick Quillier, avec la participation de Maria Antonia Camara Manuel, 2001, p. 280 ; livre emprunté à la médiathèque Jacques Duhamel de Sanary sur mer, cote P PES.
poèmes d'alvaro de campos
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Et mon cœur est un peu plus grand que l’univers tout entier