A la maison Empereur, à Marseille, renouveler la boîte à œufs (la précédente, jaune, achetée ici même il y a un moment a fini par rendre l’âme…) en en choisissant une d’un bleu éclatant dans laquelle on pourra ranger 12 bons œufs de poules heureuses.
Et, en passant dans un des rayons (ce magasin est une véritable caverne d’Ali Baba), remarquer les ronds de serviettes en bois et en prendre pour compléter le stock de la maison.
Le rond de serviette est d’une utilité qui n’est plus à prouver, d’autant que rien ne vaut, pour s’essuyer la bouche durant le repas, une serviette en coton.
Et puis, quel plaisir de voir l’enthousiasme qu’un convive habitué de la table familiale met à choisir avec des yeux d’enfants le rond de serviette qu’on lui propose : le bleu ? le vert ? le jaune ? celui en argent ? celui qui vient d’Italie ? celui de la grand-tante Madeleine ? etc.

Je paraphrase ici quelques mots de Martin Buber, « toute vie est rencontre » (1) :
« toute vie est regard ».
Prendre soin de son regard pour en faire comme un soleil de chaque matin engrangeant tout au long du jour de ces marqueurs de vie
Prendre soin du regard des autres aussi, car regarder, c’est vivre.
Je pensais à cela hier soir en rentrant, repensant à la très vieille dame que j’ai accompagnée en dehors de son lieu de vie, juste après la porte, pas loin, quelques pas à peine, mais dehors.
Et la voilà qui disait remarquant

un bougainvillée :
Oh ! c’est un bougainvillée !
et parlant alors des bougainvillées de sa jeunesse.

le ciel
Oh ! comme le ciel est bleu !
et disant alors comme il était grand

le vent
Oh ! il y a du vent aujourd’hui !
et fermant les yeux en offrant son visage au vent qui soulevait les mèches grises de ses cheveux que d’un geste familier elle remettait en place
elle regardait en elle la brise et lui souriait.


(1) Martin Buber, Je et Tu, préface de Gaston Bachelard, Ed. Aubier, Philosophie de l'esprit, traduction de Geneviève Bianquis, 1969. Cote médiathèque Chalucet Toulon : 77884