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gapeau

  • Dans la forêt.


    A chaque fois qu’on passe devant l’Abbaye de Montrieux pour aller dans la forêt, on se dit qu’on aimerait bien habiter là, tout contre les arbres et tout contre la rivière qui coule en contrebas. On sait qu’on entendra parfois, en fonction du chemin, les cloches sonner. Combien sont-ils encore de frères trappistes au cœur de cette maison qui ne laisse apercevoir au passant que la petite chapelle toujours ouverte ? C’est un rite aussi de s’y arrêter à l’aller.
    Après, dans la forêt elle-même, c’est un festival d’arbres et de chemins qui vont et viennent. En ce début d’automne, les houx sont admirables. Les petites boules foisonnent, parfois encore jaune vif, parfois déjà d’un bel orange brillant. Dans les tapis de feuilles, des colchiques mauves, des fleurs blanches et mauves aussi, aux longues tiges qui doivent être de la famille des scabieuses, des pâquerettes aux pétales aussi fins que des cils.
    On s’assoit au milieu du thym et on regarde alors ces hautes pierres qui sont là depuis toujours. C’est auprès d’elles aussi qu’on est venu chercher quelque chose, on ne sait pas trop ; de la beauté, oui, de l’inébranlable aussi peut-être.
    La brise, en se levant, légère, fait alors sourire ce paysage, voleter les papillons et chanter les oiseaux.
    C’est bien de se sentir loin du monde.


  • Les petites feuilles d’érables.

    Tout autour du Gapeau que les dernières pluies ont transformé en torrent, la forêt est puissamment humide, trop abreuvée même par ces flots venus d’un ciel en rage pour qu’elle puisse tout absorber. Ainsi, certains chemins gardent en leur travers des mares boueuses où le pied s’enfonce jusqu’à la cheville. Mais on sent la bonne odeur de la terre mouillée et de l’humus épais. Mais on voit les lichens lumineusement vert clair s’affichant fièrement sur les écorces noires. Mais on foule sur le sentier un tapis de feuilles de charmes, jaune et doux pour le pas puis, encore plus loin, c’est sur les feuilles d’érables qu’on avance. Les plus petites d’entre elles sont de l’érable de Montpellier.
    On en prend une pour la mettre dans le carnet noir, près d’une feuille de charme ramassée tout à l’heure. Leur petitesse est attendrissante mais elle n’enlève rien à la puissance de leur clarté dans ce sous-bois touffu que le jour gris assombrit encore plus. Ce qui est petit est toujours attendrissant, mais ce sont bien elles, ces feuilles minuscules jaunes comme l’or, que l’on remarque le plus, que ce soit au sol ou encore sur les branches désordonnées de l’arbre. En la tenant par son pétiole, on la trouve aussi bien fragile. On pense à comment elle fut arrachée de sa branche par la tempête, comment elle tournoya violemment pour être précipitée à terre, et qu’on la retrouve, là. Sans doute ses trois lobes réguliers l’ont-ils aidée dans son vol, freinant la chute, telles des élytres dont elles ont presque la transparence.
    On voudrait passer le gué comme on l’a prévu, mais il n’en a plus que le nom : l’eau dévale abondamment sur toutes les pierres. On choisit de changer de circuit pour aller plus haut en suivant des chemins creusés en leur mitan par une eau cavaleuse. Mais avant, on regarde la jolie prêle dont on sait les bienfaits. On est bien en hauteur de la colline quand le mistral se lève. Au détour de la piste, au loin les montagnes enneigées. On les contemple. On prend le temps de se poser sur quelques pierres, de rester tranquille en grignotant deux ou trois arbouses rouges, de regarder tout autour et de sentir les odeurs de la forêt. Quand on redescendra vers le fleuve, on ramassera des branches de houx qu’on a vues joncher le sol. On les utilisera pour les prochaines couronnes de l’Avent et de Noël, même si on se piquera un peu les doigts !