Sur le chemin des Olivades, la sauge s’est installée en une haie d’honneur. On ne peut que s’arrêter pour en cueillir et revenir avec une brassée bleue toute odorante.
Sur la table, séparer délicatement les fleurs des feuilles : les fleurs dans un saladier et les feuilles étalées sur des chiffons de coton blanc afin de les laisser sécher. Puisqu’on vit dans une seule pièce, on changera les torchons de place au fur et à mesure des activités. Il faudra attendre que les feuilles soient bien sèches avant de les mettre dans des sachets de papier mais on pourra déjà utiliser les feuilles fraîches ou en partie séchées pour une tisane ou pour parfumer un plat de pâtes.
Le parfum de la sauge se répand. On caresse les feuilles dont on sait maintenant qu’elles sont lancéolées. On sait aussi qu’elles sont pubescentes car recouvertes d’un léger duvet de poils très fins. On repense aux verts de la fétuque afin de qualifier celui de la sauge : verdâtre, mais pas glauque, plutôt gris-vert que gris-bleu. Encore une fois, on se demande quand le gris-vert cesse de l’être pour être vert ou inversement. Il y a sans doute un gris-vert ou un vert-gris pour chaque regard.
Quand on observe bien les fleurs, qu’on trouve assez violettes finalement, on remarque qu’elles sont bien protégées, comme un fleuriste le fait pour un bouquet en l’emballant d’une feuille de papier de soie : il y a d’abord les bractées au sommet pointu puis le calice. Les pétales ne sont pas séparés les uns des autres. C’est une jolie corolle dont le bleu tend vers le violet.
On se doute qu’il doit exister plusieurs variétés de sauge et, effectivement, en furetant, c’est toute une liste qui apparaît : à feuilles de lavande, à feuilles de verveine, à petites feuilles, clandestine, commune, d’Espagne, d’Ethiopie, de France, de Grèce, de Jérusalem, des bois, des forêts, des prés, des Pyrénéens, éclatante, farineuse, glutineuse, laciniée, ligneuse, officinale, poisseuse, sclarée, tomenteuse, verte, verticillée, amère, de Dalmatie, molle, ….
Des bois. Des forêts. Comment le bois se distingue-t-il de la forêt ? C’est petit, un bois. Une forêt, c’est grand. Non, une forêt, c’est immense. Le dictionnaire Quillet Flammarion indique que la forêt est une « vaste étendue plantée d’arbres » tandis que le bois est une « réunion d’arbres et le terrain où ils sont plantés ». Le Littré semblerait sous-entendre qu’on exploite le bois des forêts, mais pas le bois des bois.
En poursuivant les recherches, on apprend que les scientifiques discutent à propos de l’origine du mot forêt, bien plus que sur celle du mot bois, issu du latin boscus. Après ces lectures diverses, on comprend que le mot bois est antérieur au mot forêt. Est-ce cela ?
Du moins, dans l’enfance, cela a été un peu cela : on a connu le bois avant d’aller dans la forêt. Là où on a grandi, il y avait « le petit bois » et « la forêt ». On avait le droit d’aller jouer avec les autres enfants au bois mais il était clairement interdit d’aller non accompagné en forêt.
On chante alors Nous n’irons plus au bois à la fin optimiste : les lauriers sont coupés mais ils vont repousser. Dans le bois de St Amand de Barbara, on joue. Dans un autre bois d’une autre de ses chansons, on cueille des fraises.
Le bois est-il plus joyeux que la forêt ? Certes, puisque dans le bois de l’enfance, on grimpait aux arbres en criant et en riant alors que dans le forêt, on y allait avec plus de cérémonie, parfois le dimanche après-midi, pour une promenade, pour observer les feuilles des arbres, ou cueillir quand c’était la saison des bouquets d’anémones ou de clochettes.
La forêt de l’enfance… Son orée éclatait au printemps d’aubépines.
Alors, l’aubépine….
Commentaires
Que j'aime vos billets si doux ! Tous les sens sont convoqués, et si souvent les émotions ! Merci pour ce blog ! Une sereine journée à vous.
De ce texte en feu d'artifice, je retiens le final blanc et
"Son orée éclatait au printemps d'aubépines."
Toute ma journée, très originale du reste...
en sera illuminée !
Portez-vous bien dans les senteurs de la plante qui sauve !
Vos poèmes en prose nous enchantent de plus en plus...
le petit bois qui flirte avec mon jardin offre aux regards de mes petits enfants cette vue de nos enfances où il faisait bon jouer ... "nous allons encore au bois !"
amitié .
Depuis que j’habite le Sud, je ne vais plus au bois. La garrigue ne remplacera jamais les chemins sous les arbres, les senteurs d’humus, les petites fraises récoltées au bord des sentiers... Cependant, elle a d’autres odeurs, d’autres saveurs mais jamais elle n’aura celle de l’enfance.
J'en ai plein le jardin de la sauge et pourtant je ne m'en sers jamais. Lorsque je vais faire un jour dans ce jardin qui est une de mes passions (tous les matins quelque soit le temps et mm s'il est tout petit) je froisse de mes doigts ces feuilles de sauge et je hume leur parfum. Je ne sais pas m'en servir, ma mère ne s'en ai jamais servi, d'ailleurs elle ne connaissait pas. J'ai donc noté que je peux en mettre dans les pâtes. Bonne journée
J'utilise parfois la sauge dans des recettes mais ce n'est pas mon herbe aromatique préférée. Par contre, j'aime beaucoup votre texte poétique comme toujours.
Mettre les feuilles de sauge à sécher, un rappel bienvenu.
Le bois ou la forêt : c'est si vrai que les deux mots nous branchent (le verbe est venu, je le laisse) sur des souvenirs si différents. La forêt de mon enfance, c'est la belle forêt de Soignes aux portes de Bruxelles, une forêt de hêtres.
Un souvenir entre autres, celui du labrador noir de maman, lâché dans la forêt, qui part tout à coup comme une flèche et débusque un chevreuil - je revois leur course ! Après cela, je l'ai toujours gardé en laisse.
Une petite tisane de sauge……...Excellent pour la santé !!
Que j, aime la sauge, son odeur, son goût hummm.... Bise, bon vendredi tout doux! Que se soit dans un petit bois ou dans la forêt, j'adore m'y balader! Bise, bon vendredi tout doux!
Encore une très belle et complète description.; à travers ces écrits , mes connaissances en botanique augmentent, c'est agréable....à défaut de pouvoir les décrire, que j'aime les senteurs des herbes, ..j'en utilise abondamment dans mes recettes..
Le bois, c'est l'enfance..et ça peut être un espace très petit..qq arbres sur un terrain vague dans lequel on grimpe et construit une cabane...les jeux en bandes...que de merveilleux souvenirs..!!
Belle journée !!
Au bois, on y dort comme la Belle, mais en forêt, on peut s’y perdre tel le Petit Poucet et ses frères... Joies et frayeurs d’enfaNice...
De mots en mots vogue la pensée et nous continuons d'apprendre.
Passez une douce journée.
"y'a un arbre- pigeon vole- dans le petit- bois de saint Amand"... dame Barbara et son chant…….
La sauge est déjà fanée ici, une variété d'Espagne probablement alors!?
Les feuilles s'emploient ici dans un tas de variétés culinaires en plus des tisanes.
Bois-forêt, que c'est intéressant, plus petit le premier, oui...je vais y penser, merci!
un bouquet de mots très riche pour un texte qui ne l'est pas moins
Quel beau texte, bravo
Bisous et bon week end
Un beau texte ! J'aime cette précision dans la description de la sauge ! Les détails sont si raffinés, souvent l'on ne regarde que l'ensemble, trop hâtivement !
Bois ou forêt, peu m'importe. Ce que j'aime ce sont les arbres qui la composent. Bon dimanche
Votre texte est une merveilleuse poésie et qui sent si bon la sauge tout comme les senteurs des petits bois ou de la forêt.
Bon dimanche après-midi.
Une leçon de botanique bien agréable, des souvenirs qui resurgissent ... cela fait du bien !
Ici, aucun doute, nous sommes bien dans la forêt ... la plus grande d'Europe ...
Belle soirée.
Et que fais-tu des fleurs ?
Je crois que je vais en "piquer" à ma gentille voisine (en demandant l'autorisation) pour en faire sécher pour les tisanes de cette hiver. Merci pour l'idée provoquée. :)
Dans le petit bois, de Trousse-Chemise, quand la mer est grise et qu’on l’est un peu...chante Aznavour.
Merci pour ce billet, petit bonheur du jour
Catherine
Une plante très élégante et ton article plein de douceurs dégage des odeurs très agréables.