La jacinthe a poussé blanche comme il était prévu. Puis, petit à petit, elle a rosi. Peut-être parce que l’amaryllis posé juste à côté d’elle lui a dit des mots doux.
Quelqu’un dit : « Nous est vraiment un bon roman. J’ai beaucoup aimé. » On rosit de plaisir.
Monter le gilet torsadé couleur rose thé ; fouiller dans la boîte à boutons, parmi les boutons roses mais il n’y a pas ce qu’il faut et se dire qu’on pourrait mettre des boutons en bois ; il va falloir aller à la mercerie.
Les fleurs d’amandiers sont écloses et blanches mais, si on y regarde bien, là, juste là, il y a un soupçon de rose.
- Page 2
-
-
Partage de quelques lignes de Jón Kalman Stefànsson.
Juste un petit extrait d’un roman de Jón Kalman Stefànsson, Lumière d’été, puis vient la nuit qui fait réfléchir sur le sentiment qu'on éprouve parfois dans notre monde actuel à savoir qu'on vit dans de l'impalpable, que tout est vide :
« Car il se trouve encore des gens qui s’attellent à écrire des lettres. Nous entendons par là à l’ancienne mode, ils couchent les mots sur le papier, ou les écrivent sur le clavier de leur ordinateur puis les impriment, glissent la feuille dans une enveloppe qu’ils portent au bureau de poste, et que le destinataire reçoit au mieux le lendemain, mais bien souvent beaucoup plus tard. N’est-ce pas là s’accrocher à un monde disparu, une forme de passéisme, une tentative de rallumer des braises depuis longtemps éteintes ? Nous sommes habitués à la vitesse, on écrit les mots sur le clavier, on presse une touche et leur destinataire les reçoit aussitôt. C’est ce que nous nommons réactivité. Dans ce cas, pourquoi prendre la peine d’expédier une lettre par voie postale, une telle lenteur met notre patience à rude épreuve – autrement dit : pourquoi aller quelque part en charrette à cheval alors qu’on dispose d’un bolide ? Les mots stockés dans les ordinateurs sont condamnés à sombrer dans le néant, claquemurés dans des logiciels obsolètes, définitivement perdus quand la machine plante, nos pensées et nos réactions disparaissent. (…) Les messages que nous échangeons par ordinateur auront disparu d’ici à quelques années et la pensée, le sentiment que nous sommes en train de rompre le lien nous obsède, ce fil qui part de notre personne plonge désormais dans le néant, nous créons un vide qui jamais ne se comblera. » (pp. 28/29)