A la ferme de Fabregas, nous étions nombreux à faire la queue après avoir rempli nos cabas de courges diverses et variées, de potimarrons, de betteraves, de panais, de carottes, de poireaux, de pommes de terre, d’épinards, salades, etc. Plus nombreux d’ailleurs qu’on aurait pu l’être dans une librairie, soit dit en passant. Nombreux, donc, et masqués bien sûr, les conversations allaient bon train. Il y avait les voraces mangeurs de légumes capables d’en démontrer à tout nutritionniste qui expliquaient doctement que la betterave peut (doit ?) aussi se manger crue, bien râpée (alors ceux-là, il est certain qu’ils vont ensuite à la Biocoop compléter leurs courses avec du radis noir). Il y avait les parents avec des tas d’enfants courant partout (ah ! quelle vitalité ont ces mangeurs de légumes en herbe !) et les attrapant parfois par le bras pour leur faire répéter les noms des légumes (c’est déjà ça, car mangeront-ils vraiment les épinards ?). Parmi ce monde déterminé à manger le plus local possible, il y avait aussi les nouveaux, qu’on pouvait distinguer à leurs hésitations pour attraper le cabas ou distinguer le sens de la queue (bien que désormais on fasse la queue partout il y a encore des novices) ; repérés, on n’hésitait pas à leur faire un sourire sous le masque et à leur laisser la place dans la queue pour entamer la conversation, genre : « Ah ! vous avez pris du panais aussi ! C’est délicieux ! ». Mis en confiance, ils pouvaient poser des questions, genre : « Et ça (montrant un potimarron), c’est comme une courge, il faut enlever la peau ? ».
Nous y voilà : pour être admis au rang de mangeurs de légumes bio, il semble évident qu’il est sacrilège d'enlever la peau du potimarron et la réponse fusait, nette : « Pas du tout, voyons ! La peau du potimarron se mange ! », accompagnée parfois d’un commentaire supplémentaire : « D’ailleurs, je vois que vous avez pris des panais, et bien moi, je les brosse seulement, je ne les épluche pas. »
D’où la question du lundi et ses questions subsidiaires : Mangez-vous le potimarron avec sa peau ? Et le panais ? Vous l’épluchez ? Vous le brossez ?
Un complément d'information : ici, on n'épluche pas.
SE POSER DES QUESTIONS / La question du lundi - Page 27
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La question du lundi. De la peau du potimarron et autres épluchages.
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La question du lundi : Du poète.
La lecture d’En dormant sur un cheval de John E. Jackson est un régal. C’est un essai sur la poésie dans lequel l’auteur présente les poèmes qui comptent pour lui. Le premier est Recueillement, de Charles Baudelaire, ce si beau poème qu’on n’avait pas lu depuis longtemps ("Sois sage, O ma Douleur, et tiens-toi tranquille.") On a pris plaisir à le relire à voix haute, ainsi que d’autres du livre et ensuite on est allé fureter dans le rayon poésie de la bibliothèque. On a d’abord feuilleté Mallarmé qui fut le poète de la découverte de la poésie, et puis tous les autres qui aident tant à vivre, dont Rimbaud, l’indispensable Rimbaud.
Elle est retrouvée.
Quoi ? – L’Eternité.
C’est la mer allée
Avec le soleil.
D’où la question du lundi ou plutôt les questions du lundi : Vous souvenez-vous du poème qui vous a fait découvrir la force de la poésie ? Ou sinon, quel est votre poète préféré ?