On a toujours pensé : la poésie est un souffle, un souffle de vie. Sur un plan personnel, il fut un temps où le souffle était si court qu’il s’absentait parfois et qu’on le perdait et il y eut même des instants pendant lesquels on crut que jamais on ne le retrouverait et puis il revenait, ouf. Pendant les temps de repos de l’après-manque-de-souffle, il fallait rester tranquille et on lisait et on lisait de la poésie et une fois on avait lu des tas de poèmes de Guillevic. Voilà pourquoi on aime ce poème qui se termine sur ce mot, souffle. Un poète fait respirer.
Etre
Où et quoi ?
N’importe où,
Mais pas rien qu’en soi.
Etre dans le monde.
Fragment, élément du monde.
Supérieur à rien,
Pas à quiconque, pas à la pluie qui tombe,
Se sentir égal
Et pareil au pissenlit, à la limace,
Inférieur à rien,
Ni au baobab, ni à l’horizon,
Vivre avec tout
Ce qui est en dehors et en dedans,
Tout ce qui est au monde,
Dans le monde.
Fétu de paille, non !
Cathédrale, non !
Un souffle
Qui essaie de durer.
(1) Guillevic, Si je n’écris pas aujourd’hui, Poésie/Gallimard, 2015, p. 45.
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Un poème pour la journée. Guillevic.
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Deux fois deux vers.
En lisant Et vous avez eu beau temps, de Philippe Delerm, on relève deux vers de Guillevic :
On ne possède rien, jamais,
Qu’un peu de temps.
Voilà bien la fulgurance de la poésie.
On se lève pour aller dans la bibliothèque, au rayon Poésie chercher ce qu’on a de Guillevic. Las, uniquement le recueil Ville. On le feuillette à tout hasard et on s’y promène un bon moment. On y trouve d’autres beaux vers dont ceux-ci :J’écris pour ajouter
Au monde quelque chose.
Voilà deux belles pépites pour la journée : deux fois deux vers de Guillevic.