Lecture : "La maison", de Julien Gracq. Un inédit trouvé dans les papiers de cet immense écrivain. Une trentaine de pages au style éblouissant ; un rêve, une parabole ? Là encore, les manuscrits sont présentés en fac-similés : écrits à la main, bien sûr. Deux versions ont suffi. La première, très corrigée, presque jusqu’au moindre mot ; la seconde, quasiment sans ratures.
Lire Julien Gracq, c’est suspendre le temps et entrer de plain-pied dans ce que c’est que la littérature. Je renvoie à l’article publié sur le beau blog Textes et Prétextes.
Ligne droite, détours et raccourcis : Le chemin du cœur est comme tous les chemins. Il va et vient et si jamais il prend une ligne droite, c’est bien souvent qu’on la délaisse pour une route plus sinueuse afin de faire le plus de détours possibles pour rallonger le temps du voyage comme si on avait peur d’arriver à bon port ou pour ce qu’on croit être un raccourci à première vue rassurant mais qui s’avère amener à l’opposé du point d’origine, voire au point d’origine lui-même, et voilà qu’on a fait du sur-place. Mais il faut toujours être en mouvement, avancer, faire confiance au cœur qui, s’il parfois s’affole, prend ses désirs pour des réalités et peut garder trop longtemps l’habitude des caprices de l’enfance, sait ce qu’il en est du cœur, – justement - de la vie, à savoir que c’est l’amour le meilleur des guides.
Bonheur du jour - Page 109
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Julien Gracq, La Maison, le chemin du cœur
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Silence, graminées, linge qui sèche dehors.
Silence : Rester à regarder les graminées qui, sur le bord du chemin, se balancent dans le vent. Elles brillent dans la lumière d’après la pluie. Des fétuques, ce que j’appelle des épillets, d’autres encore que je ne sais pas nommer et bien sûr des fleurs, coquelicots et pissenlits. Je remercie cette beauté, et ce silence aussi : ce chuchotis du vent n’est pas un bruit, c’est un souffle.
Linge : Cette belle période pendant laquelle on peut laisser le linge sécher dehors ! Et quand on le rentre, il a ce parfum de la douce chaleur du jour.