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Bonheur du jour - Page 330

  • Moisson du 28 avril 2021.

    Ecouter
    la Petite Messe Solennelle de Rossini,
    les oiseaux chanter dans la forêt,
    les cloches de l’église sonner,
    les abeilles butiner dans la viorne à l’acmé de sa floraison,
    la respiration calme de quelqu’un endormi pour la sieste sur le canapé.

    Apporter un bouquet de pivoines à une vieille dame qui
    dans son enfance,
    dans une autre région,
    en avait plein son jardin, en mettait dans sa maison et en offrait à ses voisins.

    Se réjouir trois matins de suite d’avoir trouvé une bonne ruse pour que les escargots ne puissent se délecter du basilic et de la coriandre : déplacer les pots chaque soir avant de fermer les volets. Las, le quatrième matin, l’un d’eux est bien là tout repus au milieu du basilic, bavant d’aise. Comme quoi, l’intelligence des gastéropodes n’est pas à négliger.

    Remarquer qu’il y a un ou une lectrice de plus d’Avec la vieille dame. Mais on ne sait pas où… Merci !

  • Un poème pour la journée. Apparition.


    Pourquoi Apparition, de Mallarmé ? Parce que ce poème fut un éblouissement, un jour, en cours de Français et qu’il fit naître cette envie irrépressible d’atteindre cela qui se nomme la poésie. C’est pour toujours, ces « blancs bouquets d’étoiles parfumées » qui neigent… Avoir imaginé cela, des bouquets qui neigent… Et les « blancs sanglots » … Avoir imaginé cela aussi, que les sanglots puissent avoir des couleurs ! Alors cela veut dire que si on peut donner des couleurs aux sanglots, on peut en donner à …. tout. Les répétitions de sons (assonances ou allitérations) qui font ce rythme, non, plutôt la respiration, le souffle de la vie : « la cueillaison d’un rêve au cœur qui l’a cueilli. » Et pour toujours aussi, cette « fée au chapeau de clarté » à laquelle on a souvent songé, enfant, au moment de s’endormir et à laquelle on pense encore. Cette fée existe puisque le poète lui-même la connait. Un jour, demain, après-demain, dans un an, dans dix ans, ou même encore dans l’au-delà de l’Eternité, elle fera neiger à travers ses mains mal fermées de blancs bouquets d’étoiles parfumées. On le sait bien que toutes les fées font cela.

    Apparition

    La lune s’attristait. Des séraphins en pleurs
    Rêvant, l’archet aux doigts, dans le calme des fleurs
    Vaporeuses, tiraient de mourantes violes
    De blancs sanglots glissant sur l’azur des corolles.
    C’était le jour béni de ton premier baiser.
    Ma songerie aimant à me martyriser
    S’enivrait savamment du parfum de tristesse
    Que même sans regret et sans déboire laisse
    La cueillaison d’un rêve au cœur qui l’a cueilli.
    J’errais donc, l’œil rivé sur le pavé vieilli
    Quand avec du soleil aux cheveux, dans la rue
    Et dans le soir, tu m’es en riant apparue
    Et j’ai cru voir la fée au chapeau de clarté
    Qui jadis sur mes beaux sommeils d’enfant gâté
    Passait, laissant toujours de ses mains mal fermées
    Neiger de blancs bouquets d’étoiles parfumées.


    Stéphane Mallarmé, Vers et prose, 1893.