Les jours, déjà bien longs, vont encore s’étirer jusqu’au solstice de juin prochain. C’est bien agréable. On a l’impression d’avoir plus de temps. Les mouettes font tinter leurs rires au-dessus de la rade et, dans la cour, les tourterelles accordent leurs roucoulements. Déjà quelques pas dans la rue. Les senteurs du café et du chocolat s’entremêlent avec celle du pain grillé pour qu’elles montent à l’étage réveiller les endormis. Les pieds nus viendront tapoter le carrelage et, autour de la table, ce sera comme un nid au printemps.

Passer la soirée avec Rick Bass, en relisant le mois de mars de son Journal des cinq saisons. Noter ce passage : « Le théâtre de l’univers, avec ses diverses troupes et ses comédiens, est en train de ressusciter. D’abord en noir et blanc, mais bientôt en couleurs, avec le son en prime. Cette naissance commence avec lenteur et puissance, durant ce mois où j’ai moi-même vu le jour, et dites-moi –je veux le savoir- pourquoi au bout de quarante-deux ans je me sens encore en train de venir au monde, comme si c’était la toute première fois ».
Etre heureuse de pouvoir vivre, sans forcément le comprendre, chaque matin comme un commencement du monde… même si on a bien plus que quarante-deux ans.