Insistera-t-on jamais assez sur ces yeux ouverts sur le monde qui font de nous des êtres humains, des êtres de vie.
Regarder.
Regarder droit dans les yeux ceux à qui on parle, regarder droit dans son cœur une fleur qui a éclot, regarder en face un problème qui se pose, regarder plus loin que soi-même pour aller de l’avant.
Chaque soir, partager, si on le peut avec quelqu’un, sinon avec son cœur ou sur une page de cahier, ce qu’on a vu durant la journée.
Ainsi, d’hier
les yeux noisettes d’une jeune femme qui pleurait et à qui on a dit qu’elle avait fait les choses dignement
qu'elle avait le droit de pleurer
d'avoir du chagrin
d'être perdue
les fleurs jaune vif d’un jasmin d’hiver
les vêtements usés d’une dame qu’on connait et qu’on croise parfois à l’épicerie
les nuages effilochés par le vent
les épaules basses d’un monsieur âgé qui sort de la boulangerie en tenant sa demi-baguette
et alors on se penche pour arriver à croiser son regard et on lui sourit
il sourit et fait de la main un petit signe
les tourterelles sur leur fil qui regardent autour d’elles
MOISSONNER / Bonheur du jour quotidien - Page 52
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Pistes pour le mois de février.
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Les choses à leur place.
Il y a un voilier dans la rade claire, sous le beau soleil jaune de la fin de l’après-midi. Sa coque est bleue. Ses deux voiles blanches brillent comme du satin. Elles sont toutes gonflées par le vent, entraînant ainsi la chaloupe vers le large.
Au loin, le Coudon, toujours si beau, cet amer qui surplombe la mer, à jamais.
Le fort de l’Eguillette surveille les mouettes et les vaguelettes, en même temps que quelques nuages qui décorent le ciel et parfois se pourchassent. Il a fort à faire.
Les pins maritimes sont tranquilles et les mimosas sont en fleurs.
Sur ce chemin du retour vers la maison, les choses sont à leur place.
La nuit tombera tout à l’heure. Le matin lui survivra. Il y a toujours des matins survivants.