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LIRE / Livres du matin, du sac à main, du soir - Page 49

  • Passer la soirée avec Albert et Etienne

    Passer la soirée à lire Le pays qu’habitait Einstein, d’Etienne Klein.
    Ici, on aime Einstein et c’est avec un grand plaisir qu’on suit Etienne Klein, mais lui est à bicyclette alors qu’ici, on est emmitouflé dans l’étole de laine tissée à la main à Ainhoa par un berger-tisserand et que trois chats sont lovés dans les replis de l’étoffe.
    On ne dissertera pas sur la qualité de ce livre car on n’a pas la qualité d’un critique littéraire ; d’autres le feront évidemment bien mieux. Mais on redira encore une fois notre admiration pour les livres qui viennent quand et où on a vraiment besoin d’eux.
    Dans une vie semée d’étapes, et une étape arrivera prochainement, il fallait se nourrir à propos de la lumière, du mouvement, du passé, voire, du néant, mais aussi, et surtout, surtout, de la liberté et du sens qu’on donne à sa vie.


  • Passer la soirée avec Rimbaud.

    Passer la soirée à lire Marcher, une philosophie, de Frédéric Gros, un très joli livre apporté par le Père Noël. Tous les grands marcheurs y sont : Rousseau, Nietzsche, Thoreau, … et Rimbaud, dont l’auteur rappelle, outre les marches incroyables, « Je suis un piéton » (p. 74), disait-il de lui-même, qu’il est mort à Marseille, où il était « de passage » (p. 75).
    On ne se souvenait pas que Rimbaud était mort à Marseille. Mais on se souvient d’avoir longtemps gardé dans le sac à dos un exemplaire de ses poésies parce qu’on aimait le lire en marchant, ou quand on s’arrêtait pour faire une pause. Un premier exemplaire de poche, à la couverture bleu clair sur laquelle il y avait peut-être la fameuse silhouette de Rimbaud croquée par Verlaine, un volume très usé, corné, rafistolé, avait été perdu lors d’une randonnée dans les Alpes, sans doute au Col du Bonhomme. On l’avait remplacé par l’exemplaire toujours là : un livre de poche aussi, avec le visage de Rimbaud qui se devine en négatif, dans les tons bruns. Les pages sont quasiment toutes décollées ; mais le livre s’ouvre encore aux pages qu’on aime : Ma bohème

    "Je m’en allais, les poings dans mes poches crevées

    Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou"

    Et bien sûr Le bateau ivre qu’on sut longtemps intégralement :
    "Comme je descendais des Fleuves impassibles,
    Je ne me sentis plus guidé par les haleurs :
    Des peaux-Rouges criards les avaient pris pour cibles
    Les ayant cloués nus aux poteaux de couleurs

    Je sais le soir
    L’aube exaltée ainsi qu’un peuple de colombes"

    Et on laisse sur le côté le livre de Frédéric Gros pour replonger dans Rimbaud et le relire jusqu’au plus profond de la nuit.
    "J’ai tendu des cordes de clocher à clocher ; des guirlandes de fenêtre à fenêtre; des chaînes d’or d’étoile à étoile, et je danse."