Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

liste de contemplation

  • Mademoiselle Libellule.

    Ce n’est pas à chaque fois mais souvent qu’une libellule volète autour du potager au moment de l’arrosage. Elle est bleue, très brillante, et ses ailes s’irisent d’un arc-en-ciel dans le soleil levant. Elle est plutôt du côté de la sauge et de la verveine, la sauge étant une plante qu’elle affectionne parait il. Une fois seulement, elle s’est posée sur le sommet d’un tuteur mais pas suffisamment longtemps pour se laisser observer ; impression que ses ailes étaient ouvertes. Est-ce donc une demoiselle ou une libellule ? Sa voltige est trop rapide pour conclure. Peu importe puisqu’à chaque fois elle laisse dans son sillage une myriade de petites étincelles comme le font toutes les fées et c’est l’enchantement qui compte. Désormais, quand elle arrive pour faire son petit tour et qu’elle ne peut se poser puisque l’arrosage matinal, en fait, dérange la tranquillité du lieu et l’empêche de prendre son bain de feuilles et d’eau, il s’agit de lui dire : Bonjour, Mademoiselle Libellule.

  • Contemplation/dégustation.

    En descendant le chemin au bout duquel il y a la mer, un figuier embaume. On s’arrête. A la saison des figues, il est d’usage de s’arrêter devant chaque figuier croisé durant la promenade. Peut-être y en a-t-il qu’on pourrait marauder ? Celle-ci, peut-être ? On devrait pouvoir y arriver : elle n’est ni très haute, ni très loin. Il s’agit alors d’attraper une feuille et de la tirer à soi, puis d’attraper le rameau feuillu et de tirer encore, mais tout ceci très légèrement afin d’attraper la branche qui suit d’un même mouvement et, en se haussant sur la pointe des pieds et en levant bien haut le bras on peut enfin l’attraper. Délicatement, et en faisant fi du chapeau de paille qui tombe à terre, on la détache mais on ne relâche pas du tout brusquement les branches : on repart en arrière comme si on avait grimpé sur une corde et qu’on en redescendait, tout en sentant dans la paume la chaleur du fruit. Ensuite, on ouvre la main et on regarde la figue. Elle est belle, toute dodue. Elle luit. C’est une fleur, en fait. Comme on l’a appris tout enfant, on l’ouvre en deux en partant du pédoncule jusqu’à l’ostiole au cas où il y aurait une petite bête à l’intérieur. Le spectacle est superbe : des petites billes d’or pur, nichées dans une chair pourpre, s’illuminent sous le soleil du solstice. On mord dedans, le jus s’écoule sur les doigts. C’est du sucre. On pose la peau dans l’herbe et alors qu’on va partir, la tentation est trop forte de recommencer car il y a une autre figue presque tout à côté de celle qu’on vient de déguster. Elle est irrésistible. On recommence : tirer sur la feuille, doucement, sur le rameau, tout doux, sur la branche, attention à ne rien brusquer, se mettre sur la pointe des pieds (on n’a pas pris le temps de ramasser le chapeau qui a roulé à quelques pas), tendre le bras, tirer encore un peu mais tout doucement, et attraper l’autre figue dodue, violette, charnue, luisante ; puis en la calant dans la paume relâcher la branche mais en retenant bien le rameau, puis relâcher le rameau tout en retenant bien la feuille, puis laisser la feuille reprendre de la hauteur, redescendre de la pointe des pieds et admirer la figue. Et se régaler sans passer une seule étape du rituel de la dégustation d’une figue maraudée en chemin. En partant, dire merci, un grand merci, avant de s’essuyer les mains un peu collantes aux herbes folles du bord du chemin et, bien sûr, de ramasser le chapeau qu’on remet sur la tête.