Au milieu du grand pré ensoleillé, au-delà des fleurs printanières et des hautes herbes, un monsieur peint debout devant son chevalet un tableau représentant ce même pré vert et fleuri, bordé de grands arbres. On a l’impression que l’herbe du pré a été posée en un large aplat sur la grande toile. C’est le même vert.
De l’autre côté du muret sur lequel on s’appuie, on regarde.
Puis, on le hèle pour lui dire
bonjour !
c’est beau de vous voir peindre !
merci !
Se retournant, il sourit.
Posant son long pinceau contre les quelques autres qu’il tient de la même main que sa palette, il soulève son chapeau.
On lui sourit.
On soulève son chapeau.
Puis on poursuit la promenade en gardant gravé pour un moment éternel l’image de ce tableau vivant d’un peintre debout devant son chevalet dans un beau pré vert, ensoleillé et fleuri peignant ce même pré vert, ensoleillé et fleuri.
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Jaune.
Jaune comme les forsythias admirables de ce bout de route qui rejoint la plage à l’église, sans qu’on comprenne pourquoi il y a plus de forsythias dans ces jardins-là qu’ailleurs sur le chemin de la promenade. Les fleurs ont la forme de ces petits nœuds dont on pourrait décorer les épaules de la nouvelle robe qu’on ferait porter à une fillette pour une visite dominicale.
Jaune comme les pissenlits qui poussent là où il leur plaît de leur faire, et bien souvent entre deux pierres ou alors, pour les plus curieux, sur un talus qui offre une meilleure vue sur le monde. La vaillance des pissenlits n’est plus à démontrer. Leur éternité non plus. On a le souvenir de bouquets cueillis par des petites mains et offerts d’un fier bras tendu, mis dans des verres, les tiges parfois bien inégales mais la fleur toujours souriante.
Jaune comme ces boutons d’or tout brillants de soleil dans le grand pré encore libre.
Jaune comme la lumière de ce jour.
Jaune.