Comme chaque quinzaine depuis qu’on habite dans ce nouveau quartier, aller récupérer chez la chevrière, pendant la période du lait, de bons fromages de chèvres. On les aime ultra frais, bien fondants…. On remarque pourtant, cette fois-ci, d’autres fromages et on s’enquiert de leur identité.
- Ce sont des tout crémeux, ceux-là.
- Des « tout crémeux » ?
- Oui. Je n’en ai jamais beaucoup. Ils sont délicieux. C’est incomparable avec du pain bien frais.
- Et quelle est la différence avec les autres ?
- Et bien, ils sont tout crémeux.
Elle déballe un fromage : ce qui apparaît semble sorti tout droit d’un pot de crème fraîche. Elle continue :
- Vous voyez, ils sont bien souples. Il faut les laisser dans leur papier, hein, quand vous les servez à table. Bien sûr, ce n’est pas très présentable, mais quand on les entame, comme ils sont tout crémeux, la crème, elle coule. Alors il faut bien remettre le fromage dans son paquet, car ce serait dommage de perdre la crème.
On est à deux doigts de flancher.
- Et puis, vous savez, le chèvre, c’est pas gras. En fait, c’est crémeux.
On craque :
- Mettez m’en deux, s’il vous plait.

Au moment de la pause repas, tailler une bavette avec les maçons à qui on vient de faire du café. Un chat, plus curieux que téméraire, montre son museau : le semblant de silence l’a induit en erreur et il a cru qu’il pouvait venir aux nouvelles comprendre le pourquoi de toute cette agitation. Un des maçons s’exclame : « Oh, un chat ! Vous avez un chat ? ». De ce fait, le chat s’enfuit et repart dans son placard. On répond au jeune homme qu’on en a trois. Qu’on en a eu quatre. Mais qu’il y en a un qui est parti. « Ah, moi, j’en ai juste un, mais un bébé, je viens de l’avoir. Vous voulez que je vous le montre ? » Et nous voilà partis à regarder les photos de nos chats respectifs assis soit sur des sacs de ciment, soit sur des agglos, et de s’exclamer à qui mieux mieux : Et il s’appelle comment ? Oh, c’est trop mignon ! Mais il est adorable ! Etc. Pendant ce temps, le café refroidit. Tant pis.