Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

MEDITER / Phrases à méditer - Page 24

  • Durant l’été, relire d’anciens Bonheurs du Jour : ne pas laisser les blessures avoir le monopole du souffle.


    26 mars 2018. Ne pas laisser les blessures avoir le monopole du souffle.

    C’est tout à coup que quelqu’un se met à parler de soi-même lors d’une réunion entre collègues, mettant en mots ainsi la douleur qu’on a déjà perçue dans des gestes, dans une maigreur, dans un style vestimentaire, dans des essoufflements, dans des cernes, dans des rires ou dans les aigus d’une voix, dans des épaules qui tombent ou des mains qui tremblent. Ensuite, les échanges sont beaux et riches tout autour des tasses de thé ou de café pour apporter réconfort et témoignages à l’appui. Une question est posée :
    - Et toi ? Comment fais-tu ?

    On va chercher l’assiette de shortbreads qu’on pose sur la tablette repeinte en bleu vif et on dit que, si blessures il y a eu, si blessures il y a encore, si blessures il y aura certainement, on a toujours fait en sorte d’exister aussi avec elles et, dans les meilleurs des cas, en dehors d’elles car elles ne sauraient réduire notre être à la souffrance et à n’être que plaie. C’est ainsi que doit aller la vie. Il ne s’agit pas de les nier et de faire comme si elles n’existaient pas : bien au contraire, il faut leur laisser de la place ou plutôt, il faut leur laisser de l’air car une souffrance étouffée s’enkyste et s'enflamme. Mais pas toute la place car sinon les blessures ont le monopole du souffle. Comme on parle à un enfant à qui on explique qu’il doit partager, on peut parler à ses blessures en leur disant :

    « Ecoutez, vous, les blessures, vous n’êtes pas toutes seules ici. Poussez-vous un peu quand même pour qu’il y ait de la place pour le sourire, l’émerveillement devant une fleur, la lumière du ciel ou la simple communauté de la vie. Poussez-vous pour que je puisse respirer un peu. Vous êtes là, je le sais et je ne vous veux pas de mal. Vous êtes les blessures ; je sais bien ce que vous êtes ; je n’ignorerai jamais la cicatrice là sur la peau ou au cœur de mon cœur ou le tréfonds de mon ventre. Oui, vous êtes les blessures et vous êtes là dans ma vie. Je ne peux donc pas vous ignorer. Si je faisais comme si vous n’étiez pas là, vous seriez affolées et, dans votre douleur et dans un terrible sentiment d’abandon, vous ne pourriez que croître de plus belle, exigeant toute mon attention. Mon attention, vous l’avez, soyez-en certaines. Je vais prendre soin de vous, vous prendre à bras le corps pour vous apaiser. Quand vous aurez compris que je vous sais inoubliables, certes, mais que je ne vous laisserai pas me boucher la vue, nous irons d’amble, vous en repères sur mon chemin, moi debout regardant l’horizon. »

  • Durant l’été, relire d’anciens Bonheurs du Jour : Le monde vain.

    Jeudi 22 juin 2018. Le monde vain.

    Pouvoir parler à une amie écoutée longuement en puisant dans sa propre expérience personnelle ce qui est peut-être un conseil : parfois, c’est mieux de laisser tomber. Quand elle part, on ne sait pas ce qu’elle en fera, mais peu importe.
    Bien trop souvent dans la vie, on se sent obligé d’être parfait ou parfaite, c’est selon. Chaque matin, on a tout à prouver. Mais c’est ce qu’on croit. En fait, on est dans une logique du faire et de l’avoir – ne rien lâcher – et surtout, accumuler des compliments, des promotions, des charges, et renforcer un statut social.
    Parfois, quelque chose arrive, ce qu’on peut appeler un grain de sable. On ne doit pas s’en réjouir, non, pas du tout, mais on doit arriver à se poser un instant pour y réfléchir : ce qui se passe, là, c’est le signe de quoi ? est-ce que cela ne m’aide pas à mettre les choses en perspectives, à remettre de l’ordre dans les obligations de ma vie ? C’est loin d’être facile d’accepter alors de changer de logique. Après la logique de l’accumulation, on entre dans celle de la perte : « je ne suis plus », « je n’ai plus », « je ne peux plus », « ce n’est plus moi qui… », « plus personne ne m’appelle », « je ne fais plus ceci ou cela ». Mais si on est patient, on vivra le moment où on pourra dire : « je suis » et on regardera enfin tout sereinement ceux et celles qui s’agitent et frétillent de se croire indispensables dans un monde vain.