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MOISSONNER / Bonheur du jour quotidien - Page 180

  • J’ai ce que j’ai donné, disait Giono.

    En ce début d’après-midi, le jour est comme l’été : il fait beau, il fait chaud ; tout est splendide. On suit petites routes et petits chemins pour rendre visite à une amie très chère qu’on aide un peu sur le chemin de sa convalescence. Le lit est dressé au milieu du salon, face au jardin. Tout près, la table est submergée par les boîtes de médicaments ou de pansements ; une perfusion attend que ce soit le soir pour être branchée.
    On discute. On rit. On papote. On écoute. On raconte. On regarde les fleurs du jardin. On les nomme. On voit le lilas. On raconte qu’on en a vu un, pendant la semaine, dont les fleurs mauves étaient abondamment odorantes. On ajoute qu’on aime le lilas.
    - Attends, on va t’en donner.
    Et le mari de cette amie s’en va dans le jardin et revient avec un gros bouquet de lilas mauve.
    On continue à parler de choses et d’autres, et en particulier des chênes centenaires près de Bargème et du Lachens où on compte bien retourner tous ensemble. On raconte la dernière promenade de l’été dernier, quand, à peine l’aube passée, on marchait sur les touffes de thym odorant.
    - Il t’en reste, d’ailleurs, du thym ?
    - Quasiment plus. Il faudra que j’aille bientôt à la cueillette dans la colline !
    - Attends, on va t’en donner.
    Et le mari de repartir dans le jardin et de revenir avec un bouquet de thym en pleine fleurs.
    On continue à parler de choses et d’autres, à faire rire, à parler de l’organisation de la prochaine fête du village. Puis, on dit qu’on doit partir car c’est la messe des Rameaux.
    - Et tu en as, des rameaux ?
    - Non, je vais en prendre à l’église, en arrivant.
    - Attends, on va t’en donner.
    Le mari retourne dans le jardin et revient avec un gros bouquet d’olivier et de laurier dont les branches sont attachées avec du rafia.
    - Je te ramènerai du rameau béni.
    - Oui, c’est gentil.
    On repart en repensant à ce qu’écrivait Giono : j’ai ce que j’ai donné. C’est cela, aussi, qui rend fort.

  • Le lilas.

    Alors qu’on va vers la poste pour mettre un courrier dans la boîte jaune, sentir le parfum du lilas. On s’arrête. On respire encore : oui, c’est bien le parfum du lilas. Mais où est-il ? Il y en a peu par ici, région trop aride, sans doute. On continue à avancer. A descendre la rue, mais à petits pas car on regarde de part et d’autre. Il y a un croisement de petites rues dans ce quartier tranquille. On s’arrête car on le sent tout près. On y est presque. On lève la tête et on le voit. C’est un petit lilas, mais en pleine floraison. Il est simple, et non pas double, peut-être même un peu rabougri. Mais le parfum, lui, est intense. Les hampes sont violettes, comme on aime que le lilas soit. On pose au sol sac et courrier. On se hisse sur la pointe des pieds pour attraper une branchette des deux mains afin de ne pas la casser tellement elle paraît fragile, et, de si près, on se dit que cet arbre est très ancien. On enfouit son visage dans les fleurs, juste un instant. On repart vers la poste et on revient vite. On recommence à enfouir son visage dans les fleurs. A travers les grilles et l’arbre, on regarde la maison qui est fermée. Est-ce parce qu’il est tôt ? On repassera par là en plein milieu de la journée et peut-être osera-t-on sonner pour demander si on peut cueillir une branche de lilas.