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CONTEMPLER / Liste de contemplation - Page 18

  • Des nouvelles du peintre dans son pré.


    Je le vois quasiment chaque jour quand je passe pour cette promenade là qui me mène à Pin Rolland et au-delà vers la plage de la Coudoulière. Je ralentis d’abord mon pas puis je m’arrête pour contempler ce paysage qu’il est lui-même peignant un paysage.

    Il est debout devant son chevalet, pinceaux en attente et palette dans une main, un pinceau peignant dans l’autre main, chapeau sur la tête. Il est de biais par rapport à l’amandier qui est au centre de sa toile. Il n’y a aucun doute sur le fait que ce soit l’amandier lui-même qui l’ait regardé en premier quand les fleurs ont apparu comme un sourire sur les lèvres d’un tout nouveau-né dont on dit qu’il sourit aux anges, l’appelant ainsi pour qu’il vienne et qu’il revienne autant que nécessaire. D’ailleurs, en retrait du chevalet, un pliant est posé face à l’amandier désormais fleuri d’innombrables feuilles en forme d’amandes effilées, signe que de temps en temps, le peintre dans le pré s’assied et regarde, non, contemple, subjugué peut-être, méditant sûrement.

    Et puis il y a le ciel. Le peintre du pré a d’abord peint le ciel d’un bel azur, ce qu’il n’était pas au tout début de son travail. Mais comment ne pas avoir confiance dans le ciel du Midi dont on sait qu’un jour ou l’autre il sera de cet azur-là ? Comme hier.

    Je me suis appuyée sur le muret. J’ai contemplé ce paysage du peintre dans son pré peignant un paysage. Tout était calme et paisible. Alors, de loin, en ôtant mon chapeau pour le saluer, je lui ai dit d’une voix un peu forte pour qu’il puisse m’entendre de là où il était : merci.


  • Les pétales de l’amandier.

    Sur la route qui redescend du Sanctuaire, c’est d’ailleurs plus un chemin qu’une route car deux voitures ne peuvent s’y croiser, admirer l’amandier qui, juste à cette courbe, étire ses branches avec joie pour que ses fleurs nouvellement nées ce printemps fassent connaissance avec le monde.
    Certaines d’entre elles sont largement ouvertes bien qu’un pétale ou deux soient encore fripés d’être restés tout repliés le temps de la gestation de la fleur ; il y avait eu d’abord, on l’avait regardé, ce léger renflement sur la branche, puis cette rondeur qui avait pointé, puis ce bouton rose et de plus en plus blanc et de plus en plus rond qui s’était enfin déployé.
    Comme ils semblent fragiles, ces pétales froissés que le vent de ce jour vient parfois frapper d’une bourrasque inattendue.
    Avaient-ils été prévenus qu’il y aurait ces bourrasques durant leur vie de fleurs ? C’est fort possible, mais comment ?
    On le sait pourtant car, on le voit chaque année, ce sera plus tard que les pétales s’envoleront dans le vent.
    Peut-être quand l’amande sera certaine, ou alors quand les fleurs se lasseront de leurs branches ?