Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

SE SOUVENIR / L'antan - Page 9

  • Transmettre.

    A la jeune femme au ventre bien arrondi maintenant, on donne le petit paletot couleur crème sur lequel on a cousu trois boutons bleu des mers du sud. Elle est heureuse, pose le paletot sur ses genoux, tient entre ses mains les petites manches. Elle dit qu’elle aimerait bien avoir un bonnet assorti – d’ailleurs, il reste de la laine, et largement. On sort les catalogues de tricot. On les feuillette. On dit : « Celui-là, il est mignon ». « Oh, et celui-là ! » « Et celui-là, avec les petits pompons ! ».
    L’espace de quelques secondes, le monde d’antan ressurgit et des voix qui ne sont plus résonnent. Les vieux catalogues, surtout les Pingouins, se superposent à ceux d’aujourd’hui. Les tons de jaunes, car on ne savait pas si ce serait garçon ou fille, alors on tricotait en jaune, éblouissent les pupilles.
    Puis on revient au moment présent. La liste s’allonge pour le trousseau du bébé. On dit le mot « trousseau » d’ailleurs, qui étonne puis qui ravit quand on l’a expliqué. Quand la liste est faite et les modèles marqués dans les catalogues par des fils de laine, on continue à discuter. L’une, allongée, les mains sur le ventre ; l’autre qui monte les mailles pour le petit bonnet au point mousse. L’une finit par dire : « Tu m’apprendrais à tricoter ? »


  • Le bouquet d’immortelles.

    A Mar Vivo, faire le plein de légumes et de fruits : salade, ciboulette, persil, tomates, courgettes, aubergines, poivrons, cébettes, abricots, pêches, brugnons ; passer au rayon fromages pour prendre du parmesan car on a prévu de faire le soir même des pâtes aux artichauts et il faudra les saupoudrer de ce délicieux fromage pour avoir l’impression d’être déjà en Italie ; passer à la boulangerie pour prendre le pain. Le sac est lourd et on demande si on peut le laisser le temps qu’on termine les courses. On file à la poissonnerie tout à côté pour prendre de la morue que le poissonnier met directement dans le contenant ; il a désormais l’habitude de la dame qui ne veut pas de sac.
    On retourne prendre le panier et là on remarque chez la fleuriste des bouquets d’immortelles.
    Le temps s’arrête puis en un tourbillon revient à ce jour où on avait eu le droit d’avoir aussi son propre bouquet de fleurs à mettre dans la chambre. Cela avait été un bouquet d’immortelles. Jaune, rouge, orange : trois couleurs bien chaudes. On nous avait expliqué qu’il fallait toujours choisir des fleurs qui tiennent, car « c’est cher, quand même, on peut pas toujours acheter des fleurs, et il faut, dans l’argent de la semaine, en mettre un peu de côté et au bout de quelques temps, on a les sous pour. »
    On rentre à la maison avec ce merveilleux souvenir du bouquet multicolore déjà posé sur une des trois tables gigognes.