En ce début d’après-midi, le jour est comme l’été : il fait beau, il fait chaud ; tout est splendide. On suit petites routes et petits chemins pour rendre visite à une amie très chère qu’on aide un peu sur le chemin de sa convalescence. Le lit est dressé au milieu du salon, face au jardin. Tout près, la table est submergée par les boîtes de médicaments ou de pansements ; une perfusion attend que ce soit le soir pour être branchée.
On discute. On rit. On papote. On écoute. On raconte. On regarde les fleurs du jardin. On les nomme. On voit le lilas. On raconte qu’on en a vu un, pendant la semaine, dont les fleurs mauves étaient abondamment odorantes. On ajoute qu’on aime le lilas.
- Attends, on va t’en donner.
Et le mari de cette amie s’en va dans le jardin et revient avec un gros bouquet de lilas mauve.
On continue à parler de choses et d’autres, et en particulier des chênes centenaires près de Bargème et du Lachens où on compte bien retourner tous ensemble. On raconte la dernière promenade de l’été dernier, quand, à peine l’aube passée, on marchait sur les touffes de thym odorant.
- Il t’en reste, d’ailleurs, du thym ?
- Quasiment plus. Il faudra que j’aille bientôt à la cueillette dans la colline !
- Attends, on va t’en donner.
Et le mari de repartir dans le jardin et de revenir avec un bouquet de thym en pleine fleurs.
On continue à parler de choses et d’autres, à faire rire, à parler de l’organisation de la prochaine fête du village. Puis, on dit qu’on doit partir car c’est la messe des Rameaux.
- Et tu en as, des rameaux ?
- Non, je vais en prendre à l’église, en arrivant.
- Attends, on va t’en donner.
Le mari retourne dans le jardin et revient avec un gros bouquet d’olivier et de laurier dont les branches sont attachées avec du rafia.
- Je te ramènerai du rameau béni.
- Oui, c’est gentil.
On repart en repensant à ce qu’écrivait Giono : j’ai ce que j’ai donné. C’est cela, aussi, qui rend fort.
bargème
-
J’ai ce que j’ai donné, disait Giono.
-
Loto au village.
En fin d’après-midi, il est temps de se préparer pour partir au loto. En arrivant à la salle communale, il y a déjà du monde, et il faut faire la queue pour prendre les cartons. On parle des numéros qu’on veut avoir : le 7 parce qu’on l’aime bien, le 90 parce qu’il sort tout le temps, le 21 pourquoi pas. On fouille dans le tas et, muni des trésors en carton, on s’installe aux longues tables et on approche les petits cailloux qui serviront à marquer les numéros sortants. Certains ont leurs jetons. A chaque fois, on se dit qu’il faudrait qu’on en ait aussi. Des bleus.
Le jeu commence. La salle est bondée. On a repéré sur la liste des lots ce qu’on aimerait bien gagner.
Le 26 !
Ah, je l’ai ! Et trois fois, dis-donc.
Je l’ai pas. Il faudrait que le 56 sorte, j’aurais une quine.
Et bien moi, j’en suis loin.
Le 32 !
Je l’ai aussi !
Mais j’ai rien, moi… Je vais perdre.
Fais voir ? Ah oui, tu n’en as pas beaucoup…. Hé hé, moi, je vais gagner, tu vas voir.
Quine !
Qui c’est ? Qui c’est qui a une quine déjà ?
Il gagne quoi ? Une valisette ?
Ah, moi, j’aurais bien aimé la gagner, la valisette.
Et tout ceci se poursuit jusqu’à l’anti-loto, puis on reste là, on papote, on salue les uns et les autres jusqu’à ce qu’on dise : « Bon allez, on rentre, il est temps de dîner ».