En relisant sur un blog ami un poème de Pedro Salinas, envie de le relire encore une fois, encore une autre fois, etc. J’aime la poésie de Salinas qui est simple, lumineuse, ouverte sur l’infini car centrée sur le don de l’amour et sur la vie. Deux vers de lui, de son recueil « La mer lumière » (en espagnol, « El Contemplado » (traduction littérale « le contemplé », 1946) m’avaient éblouie il y a quelques années
« Les joies, la mer
et depuis je poursuis ma route avec ce poète.
« elle ne les perd jamais. » (1)
Voici aujourd’hui quelques lignes extraites de son poème « La voix qui t’est due » (1933).
« Non, ne laissez pas fermées
les portes de la nuit,
du vent, de l’éclair,
celle de l’inouï.
Qu’elles restent toujours ouvertes
les portes connues.
Et toutes, les inconnues,
celles qui donnent sur les longs chemins
non tracés, dans l’air,
sur les routes qui cherchent
leur passage
avec une obscure volonté
et ne l’ont pas encore trouvé
Aux points cardinaux.
Placez de hauts signaux,
merveilles, étoiles ;
que l’on voie très bien
que c’est ici, que tout
veut la recevoir.
Car elle peut venir.
aujourd’hui ou demain, ou dans
mille ans, ou l’avant-dernier
jour du monde.
Et tout
doit être aussi simple
que la longue attente.
..."
(1) Pedro Salinas, La mer lumière, Presses Universitaires Blaise Pascal, 2011, p. 43, édition, introduction, traduction et notes de Bernadette Hidalgo Bachs
(2) Pedro Salinas, La voix qui t’est due, Ed. La tête à l’envers, prologue Jorge Guillén, traduction Bernard Sesé, p. 15.
pedro salinas
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Pedro Salinas pour accompagner la journée.
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Quelques vers pour la journée.
En marchant le long de la mer, quelques vers de Pedro Salinas sont revenus. Les voici :
Avec joie
Combien, combien en a la mer,
combien de joies !
Etres de lumières, sur l’eau,
dansant sur la pointe des pieds.
Comme les flots finissent bien :
ils meurent en ballerines !
Dans les machines bleues
des fêtes se profilent.
Ni vagues, ni reflets ne sont
tout ce qui brille.
Ni écume celles qui jouent,
déjà évanouies.
C’est la comédie que la jouissance
monte chaque jour.
La constance dans le bonheur.
Oui, celles qui s’obstinent
Comme bonheurs, à être.
Ténacité, dans la félicité.
Les joies, la mer
elle ne les perd jamais.
Alors pourquoi ai-je
la main sur ma joue ?
Tiennes, ou miennes, peu importe,
puisqu’on les voit,
Dans l’air, dans le soleil, laissant resplendir
leur corps d’ondines ?
Si toutes les jubilations sont siennes,
elle me les offre toutes,
Comme la vie, chaque jour,
elle m’offre ma vie,
En acceptant la lumière
qu’une autre aurore m’envoie ?
Les joies qui me manquent,
elle me les fabrique.
Depuis ses lointaines profondeurs
elles cheminent vers moi.
Et là dans les yeux, les siennes
se font miennes.
Pedro Salinas, Avec joie, in La mer lumière, Presses Universitaires Blaise Pascal, 2011, p. 41,