Dans le ciel de la fin de la nuit, la lune brille intensément. Tout près d’elle, des nuages. Ils l’entourent. C’est certain qu’ils trouvent là une lumière comme celle du jour dont ils se languissent maintenant qu’elle ne va plus tarder.
Comment dire ce qu’on croit ? Qu’au fil du temps la nuit est plus courte. Pas seulement à cause de la belle saison que le printemps va prochainement s’affairer de préparer mais parce que si on vit comme il se doit, c’est-à-dire en suivant son propre pas, on n’a plus de nuit, sauf si on persiste à la porter en soi-même par peur de lui tourner le dos.
Soyons comme ces nuages blancs, tout près de la lumière. On vous dira : mais c’est la nuit ! mais on a mal ! mais on est seul ! On répondra : mais ces nuages, là, ne l’ont-ils pas trouvée, la lumière, dans cette immensité du ciel, cette nuit ? Nous-même, dans l’immensité de notre moi, nous les avons, ces traces claires. Cherchons-les.
CONTEMPLER / Pages du ciel - Page 4
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Les traces de lumière.
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Ciel, aube, rose et bleu layettes, Turner, Matisse.
Hier matin, on aurait vraiment pu dire que l’aube était en train de naître car elle avait revêtu les couleurs qu’on dédie aux naissances : blanc cotonneux, rose et bleu layettes et un peu de ce jaune qu’aimait tant le peintre Turner. Le jour pointait par vaguelettes entre les bordures colorées de nuages en forme de pompons bien alignés. C’était l’heure ; il fallait bien se réveiller ! Alors tout ce petit monde, en prenant tout son temps, s’étira, s’ébroua : les nuages peu à peu s’effilochèrent et partirent à petits pas de l’autre côté de la colline au cas où il y resterait encore un peu d’aube à décorer et le ciel bleu, prenant sa place du jour, s’installa en attendant le soleil lumineux. Celui-ci ne tarda pas à sortir de son bain de mer, là-bas, au bout de l’horizon. Il était jaune. Matisse disait qu’on n’avait jamais assez de jaune.